Sujet: Re: Les lubies de la reine Mer 7 Mar - 16:05 .................................................................................................................................................................................................................................Et voilà la suite de ma petite histoire. J'admets qu'elle a du mal à démarrer, mais ça viendra. L'histooire s'inscrit dans la durée, et le rapport au passé doit se faire petit à petit ^^ Enfin, je vous laisse lire.
Octobre, Jeudi 28Blaise avait été inspecteur à la GEA à une certaine époque. Quelques décorations, exposées bien en vue dans le salon, pouvaient en attester. Il se rappelait de cet ancien métier comme ayant été un morceau de carrière tranquille avant de reprendre ses études pour intégrer de plus hautes sphères. Il ne regrettait aucune des décisions qu'il avait prises en ce temps-là. Il trouvait ses enquêtes toutes rondement menées et, grâce à lui, des centaines de criminels purgeaient leur peine derrière les barreaux. Certains avaient même été exilés sur l'Île, ce qui était bien sûr le châtiment suprême. À ce jour, il était encore tellement fier de sa carrière qu'il conservait en toute illégalité tous les documents relatifs à ses enquêtes sur des disques durs externes entreposés sous clé dans le compartiment secret d'une commode dans la chambre qu'il partageait avec sa femme, et y jetait un coup d'oeil de temps en temps. En fait, la seule chose qu'il regrettait profondément quand il repensait à cette époque, c'était qu'on ne lui ait pas confié l'affaire dite de la « ligne rouge ». Ceci, il ne le digérerait sans doute jamais, d'autant plus que les inspecteurs en charge du dossier n'avaient jamais résolu l'énigme que représentait le meurtre.
Lorsque l'affaire était encore d'actualité, Blaise avait récolté de son côté tout un tas d'éléments, quoiqu'aucun ne l'ait aidé à trouver l'assassin. La chronologie qu'il avait reconstituée des événements était encore très vive dans sa mémoire.
13h30 : Le téléphone de la victime, le millionnaire Roberto Valezca, sonne. Il décroche. La conversation dure 6 minutes 27 secondes, temps que l'assassin met à profit pour rentrer dans l'appartement. C'est le seul créneau possible pour son arrivée, car les vigiles étaient occupés dans la rue avec un jeune homme qui cherchait apparemment sa route.
13h40 : La victime va prendre une douche d'environ 20 minutes. L'assassin cherche quelque-chose dans les affaires de la victime. Il n'est pas filmé par les caméras de surveillance qui furent brouillées juste à partir de 13h34. Le système de sécurité avait été piraté par un hacker de très haut niveau.
12h00 : Valezca va se chercher quelque-chose à manger dans la cuisine mais abandonne précipitamment son repas quand il entend un bruit. L'assassin, une femme, l'attend à la porte où ses chaussures à talons laissent une marque de vernis rouge de 3cm près du mur. Des investigations furent lancées plus tard pour retrouver le modèle de la chaussure à partir des analyses de la marque mais sans succès. La composition de la trace indiquait qu'il s'agissait d'un vernis à ongle ainsi que d'un plastique relativement mou très utilisé pour diminuer le bruit causé par la marche avec les chaussures.
12h02 : La victime connaît son assassin car aucune trace de lutte n'est détectée nulle part dans le couloir et que les vigiles n'entendent rien de louche dans l'appartement. Néanmoins un autre agent de sécurité finit par revenir vers les caméras de surveillance et détecte le brouillage. Vistime et assassin se retrouvent en présence pendant un certain laps de temps. On pense qu'il s'installèrent au salon à cause des restes d'une bouteille posée sur la table mais rien n'est sûr.
12h10 : Heure du crime. L'agent de sécurité chargé des caméras vérifiait les enregistrements et téléphonait à l'agence chargée des caméras pour savoir d'où venait le problème. Les responsables à l'agence ont détecté le programme chargé de brouiller les vidéos et préviennent les vigiles qui pénètrent en vitesse dans l'immeuble. Une femme dans le couloir leur indique qu'elle a entendu des bruits suspects dans l'appartement. Les vigiles entrent. L'assassin est déjà sorti de l'appartement à cette heure là. Valezca repose mort sur le canapé. Les traces autour de son cou signalent qu'il à été étranglé. L'un des vigiles émet l'hypothèse que c'est une corde comme on en trouve sur les bateaux qui à servi au crime. Il pratiquait un peu la voile.
12h15 : Alors que la GEA arrive sur les lieux, le feu se déclare dans l'appartement du dessous. Il est signalé par une voisine d'étage. Le propriétaire était absent au moment du crime mais l'on a détecté des traces qui permettent d'affirmer que la porte a été forcée. D'après les enquêtes, on en a conclu que c'était l'assassin qui s'était infiltré dans l'appartement, avait allumé le gaz et provoqué un début d'incendie. L'immeuble commençait à être évacué lorsqu'une explosion se déclancha au niveau de la cuisine de l'appartement.
12h18 : Les pompiers arrivent. Ils pénètrent dans l'appartement de Valezca par la cuisine pour stopper l'incendie qui se propage de minute en minute. La source de l'incendie reste inaccessible à cause des flammes.
12h27 : L'incendie est neutralisé. De l'appartement de la victime, seuls subsistent la cuisine et un morceau du couloir où la trace rouge apparaît. Le corps a été calciné par les flammes. Le seul indice qui subsiste est la mystérieuse ligne rouge sur le plancher. Les caméras de surveillance se remettent brusquement à fonctionner normalement.
Blaise avait fait de multiples recherches, peut-être même plus que tous les inspecteurs n'avaient pu en faire. Il avait recueilli le témoignage de centaines de personnes qui passaient dans la rue à ce moment-là, avait fait ses propres recherches ADN sur tout ce qu'il avait pu trouver dans la cuisine à ses frais... en vain. L'assassin n'avait pas pénétré dans la cuisine, et c'était la seule pièce intacte.
De ce côté-là donc, il avait fini par admettre qu'il n'y aurait rien à trouver. Il s'était donc lancé sur une nouvelle piste : celle du hacker, qui avait forcément un lien avec le meurtre. Il avait embauché un détective privé, demandé à des informaticiens... en vain. Il semblait que Blaise avait à faire au crime parfait.
Le ciel était toujours gris. Sauf que ce matin, il pleuvait. Alex avait sorti son parapluie de son sac. Le temps exécrable la mettait d'encore plus mauvaise humeur que de coutume. Elle marcha d'un bon pas sur le trottoir. Et lorsqu'une veille grand-mère refusa de lui céder le passage pour entrer dans le téléphérique, elle n'hésita pas à la bousculer vivement. Les gens la regardaient avec des yeux méfiants et elle leur rendait un regard emprunt de colère. Ce jour-là ne serait pas le sien.
Installée en proie aux yeux des passagers, Alex put soudain entendre résonner une voix familière.
« Bonjour la Nouvelle Île de France. Nous sommes jeudi 28 octobre et il fait actuellement 15°C. Nous vous informons qu'un accident coupe la circulation près des immeubles de l'Hopital Central. Une déviation est entrain de se mettre en place du temps que la route soit dégagée. Passons maintenant aux gros titres de la journée.»
Rien d'intéressant bien sûr. Alex observa la ville par la fenêtre. Les immeubles donnaient l'impression de dégouliner. La ville ressemblait à une vaste toile dont la peinture cherchait à s'échapper. Ce spectacle lui donnait envie de se jeter par la fenêtre pour ne plus avoir à le supporter. Elle se retint néanmoins, ce serait trop facile.
En sortant sur l'esplanade, elle reconnut l'une de ses élèves Maria Angelica Malécie. Elle se pressait sur le trottoir et cherchait à héler un taxi. La pluie battante la trempait jusqu'aux os au bord de la route, et cette même pluie réduisait la visibilité des conducteurs qui ne la prenaient pas au passage, où alors se pressaient vers d'autres horizons. Alex rejoignit le trottoir, son attention vissée sur son élève de 8ème année. Elle repéra un taxi qui arrivait vers elles. Dans les yeux du conducteur il lui sembla lire qu'il ne s'arrêterait pas. Il s'accrochait à son volant, une pointe de contentement de se savoir à l'abri alors que les autres étaient dehors. Alex n'hésita pas une seconde et se précipita sur la chaussée. Un masque d'étonnement se peint sur le visage du chauffeur qui pila dans la seconde. Sous la grisaille qui embrumait la ville, la jeune femme ouvrit la porte du taxi avec force avant de laisser son sac sur le siège.
« Attendez-moi une seconde.
-Non mais oh ! Vous vous croyez où ? Vous m'arrêtez au milieu de la route et..., lança-til alors qu'Alex ressortait du taxi.
Elle s'avança entre les petits matinaux pressés qu'un peu d'eau n'effrayait pas. Devant elle Maria Angelica désespérait. Elle passa une main dans ses longs cheveux roux trempés. Son maquillage commençait à couler.
-Mlle Malécie ?, risqua Alex.
L'interpellée ouvrit de grands yeux surpris.
-Mlle Devy ?
Elle hocha la tête avec un sourire. Néanmoins la pluie se rappela à elle et elle poursuivit.
-J'ai arrêté un taxi. Comme nous allons au même endroit...
-Merci beaucoup, s'exclama-t-elle avec joie.
Elles revinrent ensemble vers le véhicule où le taxiste commençait à perdre patience.
-Eh ben ça y est ça se décide ! Merci de me faire attendre. Vous me le paierez, et c'est rien de le dire.
-Mais oui c'est ça, conduisez-nous plutôt à l'Université Johan Rêve.
-Ouais. »
Alex se retourna vers son élève qui avait l'air plutôt gênée. Elle avait baissé la tête et tentait discrètement d'essorer ses cheveux. Elle n'obtint toutefois que peu de succès et s'enfonça dans son siège avec une moue défaite. La professeur décida de trouver un sujet de conversation.
« Alors, comment se passent les études ?, fut la première chose qui lui passa par la tête.
-Oh bien je suppose.
Maria était l'une de ses meilleurs élèves. En fait, elle la trouvait brillante, car si elle n'avait pas toujours de bonnes notes, elle se maintenait tout de même à un excellent niveau dans toutes les matières sans exception, et savait faire preuve de sagacité.
-Déprimée on dirait.
-Un peu, acquiesça la jeune fille avec un sourire en coin.
-Et Éric comment va-t-il ? Ça va faire une semaine que je ne l'ai pas vu en classe.
-Il a dû suivre son père qui est parti faire la tournée des départements. Les élections vous savez...
-Oui oui je comprends.
Voilà donc d'où venait le problème. Les deux adolescents sortaient ensemble depuis 5 ans maintenant. Elle ne les avait jamais vu séparés. Se trouver loin de son petit ami devait être difficile à vivre quand on a encore que 18 ans et tous ses rêves dans les poches.
-Il ne devrait pas tarder à rentrer maintenant, la rassura Alex.
-Et bien en fait non. Après ça, le père d'Éric veut l'amener voir tous les grands du gouvernement, histoire qu'il se forge quelques idéaux. Ça devrait prendre un certain paquet de temps.
-Je vois... Et ses études ?
-Je lui envoie les cours par mail.
-Tu fais bien.
-Merci.
Maria se tourna vers la fenêtre et jeta un regard déprimé sur l'étendue aqueuse.
-Bien..., souffla Alex avec malice. J'espère que ça ne te démobilisera pas. L'évaluation approche.
-Oh je crois que c'est déjà plutôt mal parti. Je n'ai pas encore ouvert un seul cahier.
-Non, c'est vrai ?, s'étonna Alex en ouvrant de grands yeux.
Elle ouvrit son sac dont elle sortit un stylo et un carnet papier et en déchira une page. Elle gribouilla quelques chiffres.
-Tiens, mon numéro de téléphone. À ne communiquer à personne bien entendu. Au moindre problème n'hésite pas à appeler. Je suis toujours disponible.
-Merci beaucoup.
-Il n'y a pas de quoi.
-Bon, coupa le chauffeur avec un brin de méchanceté dans la voix. Maintenant qu'on arrive faîtes chauffer la carte de crédit. Parce qu'on me la fait pas celle-là à moi. »
Alex actionna le tableau numérique et rassembla ses idées en même temps que les feuilles sur son bureau.
« Nous l'avons vu, cette leçon était un panorama du changement de République. Le passage de la Vème à la VIème fut, vous l'aurez compris, on ne peut plus mouvementé. Maintenant, il est demandé aux professeurs dans le programme d'approfondir une partie des cours de leur choix et je crois que zoomer un peu sur quelques éléments ici ne vous ferez pas de mal. D'après moi, vous allez donc avoir une tonne de travail en perspective pour toute la semaine. Vous préparerez ce morceau de programme supplémentaire à partir de vos connaissances personnelles et me rendrez chacun ou en groupe des exposés. Les meilleurs passeront devant la classe pour pouvoir exposer leurs connaissances.
Les soupirs se répercutèrent d'un bout à l'autre de la salle en échos.
-Et pas la peine de souffler. Vous êtes normalement briffés comme tout un chacun depuis votre plus jeune âge, et vous avez fait une leçon là-dessus en cours d'apprentissage. Ça devrait aller tout seul.
-Mais Mademoiselle, objecta un élève du premier rang, on a déjà l'évaluation sur l'évolution des réseaux de communications français au XXIème siècle pour la semaine prochaine !
-On ne rechigne jamais devant un peu de travail, répartit Alex.
Et c'est moi qui dit ça...-Mademoiselle ça va vraiment être beaucoup trop. Cette semaine c'est tout bonnement impossible.
-On a une dissertation de 20 pages à finir en littérature.
-Le club de natation lance les recrutements pour l'équipe de l'université, on a besoin d'entraînement.
-La classe d'art a un travail de reprise d'un tableau de Monnet.
-Ça va stop j'ai compris, arrêta Alex.
Elle avisa au fond de la salle un groupe d'élève qui n'écoutait rien depuis le début de l'heure mais bavardait tranquilement d'elle ne savait trop quoi.
-Je vais vous donner une base de travail pour faciliter le fil de vos recherches. Vous n'aurez plus qu'à compléter par-ci par-là. Bon, par contre il va falloir se dépêcher.
Elle fit afficher une page internet sur le tableau.
-Donc dépêchez-vous nous avons dix minutes. Milieu du XXIème siècle ?
-La crise de l'éconnomie provoque l'effondrement de la monnaie, répondit Maria.
-Bien et donc ?
-Et donc le monde entier est en crise ce qui provoque les Révolutions de Feu dans les pays auparavant à fort potentiel économique, lança un autre élève.
-Nous y voilà. Les révolutions donnent naissance à la disparition de la Vème République en France et à la naissance un gouvernement provisoire. Quel événement majeur modifiera le tracé destructeur que prenaient les révolutions au fil des vingt années qui suivirent?
-Le début des tornades à répétition sur les États-Unis en 2086. Qui se poursuivent d'ailleurs encore aujourd'hui.
-Résultat de trop nombreux morts et une immigration massive sur les continents européen et asiatiques. Un monde unipolaire est entrain de se reformer autour d'un même État qui englobe tout les autres. C'est ainsi que le monde commence à renaître de ses cendres dès le tout début du XXIIème siècle. Quelqu'un pour poursuivre ?
-Les ingénieurs se mettent au service de la société pour les innovations massives qui donneront lieu à un recul de la crise et à l'installation d'une monnaie mondiale..
-Et c'est ainsi qu'arrive la VIème République en France avec à sa tête ?
-Johan Rêve.
-Et ben..., ironisa Alex. vous aviez vraiment besoin de moi ou c'était pour passer le temps ? Bon, Johan Rêve assassiné en ?
-2157, cria Maria pour couvrir le brouhaha naissant.
-Bon. Vous pouvez sortir. Je vous attends au tournant. »
Sally Fox était assise sur le canapé. Son ordinateur sur les genoux, elle tapait, retapait et reretapait sans qu'on put voir une fin à son travail effréné. Chercher les informations, retranscrire, trouver une coordination. Elle était entrain de refaire une vie. Elle ne comprenait pas exactement pourquoi elle faisait ça mais elle supposait que chacun avait ses raisons de modifier son passé.
« Si j'ai bien compris tu veux qu'elle soit ailleurs à ce moment-là ?
À l'autre bout de la pièce, près de la baie vitrée qui offrait tant de lumière à sa maison, Charly releva la tête de sa tablette électronique. Il sembla être face à un dilemme intérieur.
-Non... Ce qu'il faut c'est que tu modifies le cercle de ses fréquentations à ce moment-là.
-Toi par exemple.
-C'est ça.
-Je ne vois pas bien pourquoi..., songea Sally à voix haute.
Sans qu'elle ne puisse dire ce qui la poussait à penser cela, elle sentait qu'il y avait anguille sous roche. Elle connaissait Charly depuis un certain temps maintenant. En fait, cela faisait trois ans qu'ils bossaient plus ou moins ensemble. C'était un collègue agréable, qui avait toujours une plaisanterie pour mobiliser les troupes, même s'il était aussi parfois d'humeur taciturne lorsqu'en général il pensait qu'on ne lui prêtait pas attention. Elle en avait toujours eu une très haute estime, d'autant plus qu'il excellait dans son métier. C'était un programmateur hors pair, et il fallait bien avouer qu'il était beau garçon. En outre, ses yeux étaient à tomber par terre. Elle se demandait souvent pour quelle raison étrange elle ne le voyait jamais accompagné.
Enfin, derrière ces petits détails, ce qu'elle trouvait particulièrement bizarre, c'était cette fille dont il lui avait parlé, et le fait qu'il lui ait demandé de l'aide pour des modifications illégales sur sa personne. Il avait assuré que ce n'était pas grand chose mais elle en doutait de plus en plus. Elle ne voyait pas comment modifier un dossier de la GEA pouvait être anodin. Et puis... Qu'est-ce que ça pouvait faire qu'il apparaisse dessus, si d'ailleurs ce n'était que pour mentionner qu'ils avaient été dans la même université ?
-Tu es sûr de vouloir faire ça ?, s'assura-t-elle.
-Oui. Et vérifie bien les fréquentations affichées par rapport à la liste.
-Oui... je fais ça oui.
Charly sentit bien que Sally avait des doutes sur quelque-chose. Il ne fallait pas que ça s'envenime.
-Sinon, tu sais quoi ?, proposa-t-il. Laisse-moi faire ça. Toi jettes un coup d'oeil à la programmation.
-Ça roule. »
Ils échangèrent de place dans la salle. Cela faisait toujours bizarre à la jeune spécialiste en informatique de la GEA de pouvoir travailler sur les bases de celui qu'elle prenait bien souvent pour modèle.
Les modifications prirent plusieurs heures, mais le plus dur était à venir. Il fallait maintenant remplacer le dossier du serveur de la GEA par celui qu'ils avaient sur leur ordinateur. Sally assura qu'elle s'en occuperait. Elle était d'ailleurs certaine que si Charly lui avait confié ce petit boulot c'était parce qu'elle avait accès au serveur. Toutefois elle n'en dit rien et se garda de toute remarque. Il fallait qu'elle efface de sa tête tout ce qui pourrait assimiler Charly à une affaire louche. D'ailleurs elle ne pourrait pas travailler avec lui si elle n'avait pas confiance.
Elle quitta la maison à midi moins dix. Juste assez de temps pour le jeune homme pour se préparer et se rendre sur son lieu de travail valider ses heures. Il n'était pas obligé d'y rester tout le temps. En fait, il avait la chance de pouvoir tout faire à domicile puisqu'étant tout équipé. Ingénieur en informatique était ainsi pour lui une profession aussi prestigieuse que confortable, et il en était fier.
Dans un coin de la pièce, un carton attira inexorablement son regard. Il n'avait pas encore eu le temps de revoir toutes les photos qu'il contenait mais se promit de le fouiller entièrement dès qu'il serait rentré chez lui, après avoir accompli tous ses devoirs envers son entreprise.
Alex avait déjà presque fini sa matinée de travail, et déjà elle en avait marre. John Cardo n'avait pas dit un mot de la séance. Il avait passé son temps à gribouiller sans l'écouter. Elle convenait très bien que la Renaissance ne passionnait pas tout le monde, même pas elle mais là il foutait sciemment son année en l'air. Peut-être que ça l'amusait beaucoup, et bien pas elle. Elle pensait pourtant au début du cour que le voir s'occuper à autre chose qu'à l'énerver lui procurerait un peu de détente mais non. C'était pire que d'habitude. Décidément, ce type avait un don réel pour l'agacer, et elle n'allait pas le laisser passer.
« Vous pouvez sortir. Sauf M. Cardo qui va se faire un plaisir de venir s'asseoir en face de moi.
L'élève eut l'air surpris et ses camarades ne pipèrent pas mot. Ils avaient pourtant pensé que le cour s'était pour une fois déroulé sans anicroche. John Cardo ramena son visage arrogant jusqu'au bureau.
-Ça vous manque que je parle en cour, hein Mademoiselle ?
-Très drôle M. Cardo j'adore votre sens de l'humour. Et si, au lieu de déblatérer, vous me montriez plutôt les cours que vous avez pris aujourd'hui ?
Le sourire se métamorphosa en grimace.
-Désolé je ne suis plus en école d'apprentissage, je ne suis pas tenu de vous montrer ce que je note.
-Tu vois je serais de toi, insista Alex, je ne serais pas si sûr de ça. Un professeur peut demander à un élève de lui montrer ce qu'il a fait pendant l'heure. Vide ton sac sur le bureau.
John Cardo lui jeta un regard de défit mais savait bien qu'il n'avait pas d'autre solution que d'obtenpérer. Il ouvrit donc son sac et en sortit les affaires sous le nez de la prof de plus en plus intéressée.
-Tiens tiens tiens, c'est presque vide, c'est étrange ça, railla Alex avec un plaisir non dissimulé. »
Elle retourna les cahiers et classeurs dont les feuilles s'échappaient par endroit et ouvrit celui qui lui était réservé. L'écriture soignée de l'élève apparaissait bien pour quelques notes quotidiennes. Les contrôles se succédaient et se ressemblaient. Il avait un peu plus que la moyenne mais rien que l'on puisse juger excellent. Un laisser-aller étonnant comparément à la prétention dont il faisait preuve. Elle lui offrit un sourire satisfait en découvrant quelques gribouillis de droite et de gauche, rien qui ne puisse toutefois le faire passer dans la catégorie des je-suis-dispensé-de-cours. Elle feuilleta jusqu'à la fin et c'est là en fait qu'elle trouva ce qui pouvait se révéler le plus intéressant. Alex avait alors en main une feuille noircie au crayon qui aurait dû servir à la prise de cours. Il n'y avait encore rien sur la Renaissance dans son classeur.
Sur la feuille on la reconnaissait très nettement, assise sur son bureau entrain de faire cours. Le tableau numérique montrait la leçon du jour à travers une oeuvre d'époque. Le dessin n'était pas sarcastique, encore moins vulgaire. C'était tout simplement une représentation parfaite de la salle de cour, avec une ambiance que rien dans la pièce n'aurait laissé soupçonner. C'était un mélange de lumière et d'oppression. Elle se rendit compte que naissait en elle un sentiment enfantin de claustrophobie devant le dessin, et qu'il représentait une échappatoire invisible dans un ailleurs baigné de lumière sans pour autant montrer autre chose que la pièce. Elle se trouva un éclat dans les yeux sur l'image qui la dérouta elle-même.
« Je vous inspire M. Cardo ?, demanda-t-elle pour quitter ses pensées.
Bien entendu, il ne répondit pas. Alex se trouvait en face d'un phénomène qu'elle pensait ne jamais avoir à affronter.
-Il y en a beaucoup des comme ça ?
-Quelques-uns, biaisa-t-il.
-Vous dessinez depuis longtemps ?
-Un peu.
-Montrez-vous un peu plus coopératif ou c'est deux heures de colle tout de suite. Vous prenez des cours de dessin ?
-Non.
Alex était de plus en plus étonnée. Elle se demandait ce qu'elle avait de mieux à faire. Punir Cardo pour ne pas écouter en cours ? Non, ça n'aurait pas été la première fois. Faire comme si de rien était et le laisser sortir ? Non, son petit doigt lui disait que ce n'était pas la bonne solution. Il faisait de moins en moins attention à ses études et dans le même temps dessinait comme un artiste... En corrélant les deux informations, la décision à prendre devenait claire.
-Pourquoi ne pas avoir intégré une classe d'art ?
-L'art ne sert à rien, se braqua-t-il.
-Évidemment !, s'exclama Alex avec sarcasme. C'est pour ça que vous dessinez d'ailleurs, parce que ça ne sert à rien !
-Vous allez me laisser tranquille à la fin ? Qu'est-ce que vous voulez ? Que j'aille en colle ? Vous n'avez qu'à envoyer un mot au proviseur !
-Non. Moi je veux voir vos parents.
-Ah ouais... ?! Et... pourquoi ?
-Pour la simple et bonne raison que vous n'avez rien à faire ici ! Si un jour vous voulez percer quelque part, ce ne sera pas dans le cercle 5, ça ne pourra être que dans l'art.
-Mais qu'est-ce que vous en savez ? De quoi est-ce que vous vous mêlez ? Je vais dans la classe que je veux c'est compris ? Et vous ne verrez pas mes parents !
John Cardo mit ses affaires dans son sac et s'éloigna avec colère. Il allait sortir sous la pluie lorsqu'Alex lui cria :
-Je ne suis pas sure que vous désiriez de tout coeur intégrer le cercle 5. »
Il claqua la porte derrière lui.
Le bureau de Charly se trouvait au sommet d'une tour de centre ville, un peu trop loin de la mer à son goût. Il n'y avait pas grand chose d'intérêt à l'intérieur et n'importe qui aurait pu le trouver affreusement impersonnel. Pas de cadre photo pour parents, femme et enfants, pas de petit bibelot au coin des meubles, ni même un cadre où aurait trôné un chef d'oeuvre d'art abstrait que tout membre d'une bonne entreprise s'arracherait. Sur le bureau ne traînait aucun papier qui aurait pu donner une ambiance bordellique bienvenue dans le vide environnent et toute la pièce était d'ailleurs soigneuse rangée. Ses collègues voyaient là un « manque d'originalité certain » et ses amis lorsqu'ils entraient pour la première fois disaient « t'as l'air de t'amuser au travail toi ! ». De plus, quand on lui demandait : « dis Charly tu voudrais pas... ben je sais pas moi... te l'approprier un peu ce bureau ? » il répondait immanquablement « et comment ? » ce qui signait en général le début d'un long débat sur sa vie privée.
Charly Morgan avait perdu son père des suites d'un infarctus à 49 ans. C'était jeune, quoique familial d'après ce qu'il avait attendu. En clair, il s'attendait, lui aussi, à mourir d'une déficience cardiaque dans la cinquantaine (soyons optimistes). Il ne s'était jamais entendu avec sa mère qu'il trouvait complètement cinglée et qui vivait pourtant à deux pas de chez lui. Il n'était ni marié, ni fiancé et n'avait pas non plus de petite copine en ce moment. Il ne s'attachait d'ailleurs jamais assez à une fille pour que leur relation dure plus d'un mois. À chaque fois, il lui trouvait un minuscule défaut qui suffisait selon lui pour rompre avec la personne. Inutile de le préciser, mais Charly n'avait pas de fils non plus.
Concernant les amis il n'en avait aucun qu'il aurait aimé voir exposé sur son lieu de travail, même Alex (ou peut-être surtout Alex). Il n'aimait pas les bibelots poussiéreux et encore moins l'art abstrait. Bref, Charly n'avait jamais rien trouvé à intégrer à son bureau. Et ce n'était pas près de changer.
Sally se trouvait dans le bureau lorsque son ami arriva. Elle furetait entre les meubles, les yeux ailleurs. Elle attendait quelque-chose, peut-être Charly lui-même, aussi il s'avança lentement avant de s'annoncer en toquant à sa propre porte.
Sally sursauta et porta la main à sa poitrine. Elle dévisagea Charly avec un sourire.
« Mais qui voilà ?, s'exclama-t-elle. Celui que je voulais voir !
-Tu... voulais me voir ?
-Oui parce que j'ai une bonne nouvelle à t'annoncer.
Plus que surpris, Charly ferma la porte de son bureau et s'assit dans son siège. Il se demandait déjà ce que Sally avait bien pu comploter.
-Tu sais ton amie Alex...
-Oui...
-Quand j'ai rentré son dossier sur le serveur, je me suis aperçue qu'un avis de l'accadémie de répartition avait été posté.
-Et... ?
-Et bien l'avis mentionnait qu'elle allait devenir GEA.
C'était donc simplement cela ? Soit, Charly acquiesça de la tête sans trop de conviction, ce qui fit sourire Sally qui poursuivit :
-Et qu'elle allait changer de région.
Charly ouvrit de grands yeux. Qu'est-ce que c'était que cette histoire. Il médita l'information, sur la défensive, avant de demander simplement :
-Où est-ce qu'ils l'envoient ?
-Côte méditerranéenne, exactement là où elle était avant ! Étrange la coïncidence, hein ? Ah ! Je savais que ça te ferais plaisir ! ... Mais qu'est-ce que tu fais ?, s'alarma-t-elle en le voyant sortir son téléphone. Oh oh oh, doucement, d'accord ? Tu n'es pas censé être au courant et elle ne l'est certainement pas encore. Il faut que tu fasses comme si je ne t'avais rien dit.
-Quoi !? Comment veux-tu que je fasse ça ? Je ne peux pas lui cacher !
-Si tu es obligé sinon j'enlève le dossier à la GEA. Tu vois que tu m'écoutes quand tu veux. De toute façon j'ai vu que son conseil de répartition était dimanche. Tu n'auras pas à attendre longtemps avant qu'elle l'apprenne.
-Mouais, grimaça-t-il.
-Et ne fait pas la tête maintenant ! J'ai entendu dire que tu avais du boulot, alors mets-toi plutôt au travail. Moi je vais rentrer au poste et te laisser en paix. Ne t'avises pas de profiter de mon départ pour appeler Alex. N'oublies pas que je travaille à la GEA. Si tu lui passes un appel, je le saurai !
Ben voyons...Elle recula jusqu'à la porte, fière de son petit numéro. Charly le lui laissa savourer avec un faux air offensé.
-Allez, files de là vas, lui ordonna-t-il en plaisantant. Tu vas être en retard à ton poste.
Elle lui fit un clin d'oeil avant de passer la porte.
Cette fille alors, songea-t-il rieur,
toujours à fourrer son nez partout. Un jour je vais avoir des ennuis à cause d'elle si ça continue. Enfin, voyons un peu ce qu'on me réserve... Il ouvrit son ordinateur sur la session de l'entreprise et aussitôt, une fenêtre lui apprit qu'une information importante venait d'arriver sur sa messagerie interne. Qu'est-ce que ça va être encore ? Il cliqua sur l'icône indiquée et se retrouva sur la page de l'entreprise. En gros au sommet de la page s'étalaient les lettres « TTP » suivies de leur explication : « The Twin Projects », mots inaccessibles au commun des mortels. En effet depuis l'effondrement des États-Unis en 2086 l'anglais avait été faire un petit tour du côté des langues les moins parlées du monde, seulement encore adoptée par une petite partie des habitants des Royaumes-Unis qui n'avaient pas encore intégré le chinois, le japonais ou le français, les trois nouvelles langues mondiales. Charly, pour sa part, dans le besoin, l'avait très rapidement intégré, tout comme Alex l'avait fait. C'était toujours utile lorsqu'on ne voulait pas être entendus...
Il parcourut la page des yeux et s'arrêta vers le milieu d'un article publié dans la toute confidentialité des membres de la grande entreprise. « dilemme concernant le remplacement du directeur et propriétaire Keneth Dawson » ... hop hop hop. Charly revint en arrière et reprit l'article depuis le début :
Avis de crise de l'entreprise.
Mdme la co-directrice Rachelle Cols.
Mercredi 27 Octobre.
Des suites d'une affaire de rumeurs dont la GEA est entrain de revoir les détails, notre directeur : Keneth Dawson, a été mis en examen. Il est évident que l'affaire s'étouffera sous peu suite à un manque d'information puisque M. Dawson n'est coupable d'aucune escroquerie. Néanmoins les médias sont à l'affût du moindre détail croustillant et cherchent déjà à questionner, en ce moment même, plusieurs membres de l'entreprise. Nous vous invitons donc à ne répondre sous aucun prétexte. Pour la survie de l'entreprise et des emplois.
Cordialement.
Ça se voit que je n'étais pas passé au bureau depuis une semaine... Charly n'en revenait pas d'avoir manqué une telle information. De plus, ça ne s'arrêtait pas là. Un nouveau communiqué suivait le précédent.
Avis de crise de l'entreprise (suite).
Mdme la co-directice Rachelle Cols
Jeudi 28 Octobre.
Les informations suivantes n'ont pas encore paru dans les médias et ne doivent être communiquées sous aucun prétexte. M. Dawson a été placé en détention provisoire. Des éléments nouveaux sont apparus dans l'enquête qui révèlent sa probable implication dans une escroquerie. La source de tout ceci est encore inconnue bien qu'elle soit en contact constant avec la GEA pour l'avancée de l'enquête. Tout ceci nous pousse à penser, moi même et l'ensemble de la direction, que des modifications vont voir le jour bientôt. Le dilemme concernant le remplacement du directeur et propriétaire Keneth Dawson a été posé et est toujours en cours d'étude. Il faudra également revoir les collaborations de l'entreprise et peut-être que plusieurs de nos membres devront être expatriés ailleurs dans le domaine informatique. Que personne ne panique : aucune mise au chômage ne sera à déplorer dans l'entreprise si de telles mesures viennent à être prises.
De nouvelles informations seront bientôt publiées sur les suites de l'enquête et/ou les suites du remaniement interne. Jusque là nous vous prions de garder le silence.
Cordialement.
Charly se précipita aussitôt sur son téléphone et composa le numéro de son supérieur qui ne tarda pas à décrocher.
« Cabinet de programmation TTP.
-Je voudrais parler à M. Blanc, c'est Charly Morgan.
-Une seconde je vous pris.
Il y eut quelques « bips » sonores.
-Bonjour M. Morgan que puis-je pour vous ?
-Je viens de lire les annonces sur la page privée de TTP.
-C'est vrai que vous n'étiez pas là de la semaine...
-Oui. Je suppose que vous n'étez pas beaucoup plus au courant que moi mais par hasard sauriez-vous si les postes à la programmation font partie des postes qui risquent d'être « remaniés » ?
-C'est la cinquantième fois que j'entends cette question cette semaine M.Morgan. Et pour la cinquantième fois je répondrai que tous les postes seront touchés. Si l'affaire est aussi sérieuse que les silences ambiguës des médias le laissent, penser de nombreux postes seront supprimés d'ici l'annonce de la condamnation du directeur. Je ne sais pas dans quelle branche nous allons tous atterrir. Cela dépendra certainement des CVs.
-Si c'est pour me retrouver dans une agence téléphonique je m'éviterais bien le détour.
-Je comprends parfaitement M. Morgan mais nous sommes tous dans le même cas. Sur ce si vous n'avez pas d'autres questions...
-Oui bien sûr. Merci beaucoup Monsieur.
-Bonne journée M. Morgan. J'attends votre dossier. »
La salle était encore vide, Alex venait de rentrer. Elle avait avalé à toute vitesse un hamburger dans un snack du coin avant de rejoindre son lieu de travail. Même pas le temps de s'asseoir, déjà on toquait à la porte.
« Entrez !
Le directeur pénétra à l'intérieur. Il lui adressa un signe pour qu'elle n'ait pas à se déplacer et la rejoignit après avoir fermé la porte. Il scruta les alentours avec attention.
-Comment allez-vous Mlle Devy ?
-Très bien merci. Et vous ?
-Relativement bien. Quelques soucis du moment mais je ne viens pas vous parler à propos de cela.
-De quoi s'agit-il ?
-Je n'étais pas censé vous prévenir. J'étais tenu au secret jusque-là, mais tant pis. Les élèves ont appris pour votre départ imminent.
-Ah. Et que se passe-t-il ?
-Rien de grave, seulement il semblerait que vous allez manquer à certains. Les 8° années qui vous ont eu deux ans de suite souhaitent organiser quelque-chose le jour de votre départ. À vrai dire lorsqu'ils ont connu le nom de votre remplaçant, la nouvelle n'avait pas l'air de les réjouir. Bref ! Je souhaite absolument vous voir le vendredi soir de votre départ dans l'établissement. C'est pour ça que je vous préviens. J'ai peur que vous ne prévoyez des vacances le plus vite possible et que vous ne quittiez l'université trop tôt. Je veux que vous sachiez que ce fut un honneur de vous avoir dans nos rangs ces deux dernières années. De nombreuses personnes se sont brusquement senties très intéressées par l'histoire.
Alex ne savait pas quoi répondre. Elle était tout bonnement abasourdie, positivement très étonnée. Elle n'avait pas encore réellement pris la mesure du fait que bientôt elle quitterait l'université pour de bon, abandonnant ses élèves. Certains lui manqueraient beaucoup car il fallait bien qu'elle avoue qu'elle avait développé un certain attachement par rapport à eux. Les larmes lui montèrent soudain aux yeux tant ce qu'elle ressentait la submergea. Le fait que ces élèves souhaitent lui témoigner une dernière fois leur gratitude avant son départ la chamboulait plus qu'elle ne l'aurait cru. Elle était très heureuse de ce témoignage.
Elle tenta tout de même de refouler ses larmes devant son patron, quoiqu'un sanglot la trahit. Aussitôt, il prit les devants :
-Ah non je ne voulais pas vous faire pleurer. Reprenez-vous voyons ce n'est pas grand-chose après tout. Reprenez-vous vous dis-je...
Elle esquissa un rire et se mit en quête d'un mouchoir dans son sac.
-C'est que ça me réjouit tellement... et puis c'est tellement soudain. Dire que ça fait déjà deux ans que je les côtoie.
-Ça vous passera va. Vous ne devriez pas...
On toqua une nouvelle fois à la porte. Le visage enfoui dans son mouchoir, Alex put néanmoins discerner John Cardo qui les observait par l'entrebâillement. Aussitôt, le directeur indiqua avec bonhomie :
-Vous pouvez rentrer M. Cardo, j'allais m'en aller justement. Bonne fin de journée Mlle Devy.
-Merci... vous aussi.
Alex se moucha bruyamment et tenta d'essuyer rapidement ses larmes. Malgré le fait que le directeur soit déjà sorti, John hésitait à franchir le seuil. Le voir avait tout de suite refroidi la joie d'Alex qui se sentait pleine de rancoeur à chaque fois qu'elle apercevait le garçon.
-Eh bien qu'est-ce que vous attendez ?, l'interrogea-t-elle, sans animosité toutefois.
Il regarda tout autour de lui comme pour y chercher une échappatoire. C'étaient pourtant ses propres pas qui l'avaient conduit ici, sa seule volonté. À présent il devait assumer sa décision. Avec circonspection il s'approcha donc du bureau métallique, mettant tout le temps possible entre son arrivée et le moment où il aurait à s'asseoir. Cette attitude si effacée surpris Alex qui avait l'habitude de le voir bien plus suffisant. Son manque de démonstration de supériorité l'inquiétait. Complotait-il quelque-chose, ou une chose plus personnel, plus sombre, se tramait-elle ?
-Allez-vous vous décider à me dire ce qui vous amène ici, M. Cardo ?
Il prit d'abord le temps de s'asseoir. Un regard insondable se ficha dans le sien. Tous deux face à face, la confrontation prenait son vrai visage. Alex poussa tout ce qui, sur le bureau, pouvait se trouver entre elle et Cardo. Surface dépouillée entre les de camps. Serait-elle un champ de bataille ?
-Je ne veux pas que vous voyez mes parents.
Il y avait dans ces paroles un changement infime, à peine notable, à côté duquel la professeur n'était pas passée. Il ne voulait pas.
-Je croyais pourtant que l'incident était clos M. Cardo. Je verrai vos parents. Que vous le vouliez... ou non.
-Je vous demande de ne pas voir mes parents.
Nouveau changement, encore plus voyant. Alex se rencogna dans son siège.
-Demandez, demandez, railla-t-elle.
John Cardo eut un bref instant d'hésitation. Il changea de position sur son siège. Les rôles étaient pour une fois inversés. L'élève calculateur demandait la rémission pendant que la professeur exaspérée profitait de la situation.
-Je ne veux pas intégrer la classe d'art.
-Peut-être, mais vous n'avez rien à faire dans cette classe, et vous n'atteindrez jamais, je dis bien jamais, le cercle 5.
John Cardo demeura silencieux.
-Vous ne souhaitez pas intégrer le cercle 5 M. Cardo.
-Ça changerait quoi si je vous disais que non ?
-Cela changerait votre avenir. À vous de décider si vous désirez moisir dans un fauteuil grand luxe de chef d'entreprise mondiale qui ne vous sied pas, ou si vous choisissez plutôt de suivre la voie qui semble toute tracée pour vous.
-Vous ne pouvez pas faire ce choix à ma place. Et parfois le prestige importe plus que le talent.
-Ou que la pression parentale.
Cardo fit la grimace.
-Je ne subis aucune pression.
-Ben voyons, laissa mollement tomber Alex. Sinon pourquoi alors viseriez-vous des « hauteurs » pour vous inaccessibles ?
-Parce qu'elles me sont accessibles.
-Qui croyez-vous leurrer ? Vous ou moi ?
-Je vous retourne la question.
Les deux adversaires s'affrontèrent du regard.
-Qui croyez-vous leurrer en vous attribuant soudain un statut décisionnel que vous ne possédez pas ? Vous ou moi ?
Un à un. Le match s'annonçait serré.
-Vous manquez donc tant d'argument que vous vous amusez à reprendre les miens ?
-Vous manquez donc tant d'argument que vous amusez à faire comme si vous en aviez ?
Alex sourit. John Cardo restait impassible.
-Vous savez très bien que malgré tout ce que vous venez de me dire je parlerai tout de même à vos parents. La question est donc, qu'est-ce qui vous a poussé à venir M. Cardo ?
-Vous pouvez voir mes parents, vous ne pouvez pas me changer de classe.
-C'est ce que nous verrons lorsque... vous en aurez changé. Maintenant, ce n'est pas que cette conversation m'ennuie mais nous en avons déjà tenu une de semblable et de plus mes élèves de troisième année arrivent. Je vais donc vous demander de quitter cette salle.
Cardo répugnait à suivre les ordres, mais il n'avait d'autre choix que d'obéir. Il se leva donc de son siège. Alors qu'Alex pensait qu'il allait partir, il ouvrit son sac dont il sortit une feuille où des coups de crayons étaient visibles par transparence. Il la considéra en quelques secondes avant de la déposer sur le bureau.
-Vous avez raison, c'est pour ça que je dessine, c'est parce que ça ne sert à rien. »
Elle n'avait pas regardé tout de suite le dessin. Anxieuse, elle avait voulu s'en saisir dès qu'il avait été posé, face contre la plaque métallique, mais son groupe d'élève turbulent se faisait déjà une place dans l'encadrement de la porte. Elle avait donc résolu d'attendre la fin du cours sur la géographie de la Nouvelle Île de France.
« Vous m'apprendrez par coeur le plan de la disposition des centres et des périphéries pour demain. Vous aurez une carte à compléter, notée cela va de soit. Bon, et puisque ça n'a pas l'air de vous enchanter plus que ça je vais être gentille et vous laisser sortir en avance. Bonne journée !
-Merci ! »
Les 3° années quittèrent la salle avec enthousiasme. Ils échangèrent quelques rires puis la porte se ferma et le silence revint. Alex se permit de souffler un peu, commanda l'ouverture des fenêtres pour profiter de la fraîcheur de l'après-midi tant que la pluie avait cessé de battre les vitres. Elle éteignit le tableau numérique, ainsi que son ordinateur portable qui sembla émettre un soupir de soulagement. Ensuite, elle s'assit, calmement. Elle respira à fond et retourna la feuille.
C'était ce qui pouvait s'apparenter à un simple portrait. Elle se regardait de ses yeux noirs au travers de la feuille. Le maquillage smoking eye mettait en relief son regard énigmatique. Une nouvelle fois, elle fut surprise par le rapport lumière et ombre du dessin et par son propre visage si... mystérieux. Comment se faisait-il qu'elle même n'arrive pas à plonger dans les propres pensées qui l'animaient sur cette image ? Comment se faisait-il que... et soudain, elle se souvint.
Ca avait été pour ainsi dire une longue journée de travail. Quatre longues heures à parler à des collègues pour peaufiner la programmation. Charly ouvrit la porte de sa maison avec un soupir de contentement. L'intérieur accueillant le rasséréna quelque peu et il se laissa tomber sur son canapé. Et ferma les yeux. Vivement qu'Alex soit là pour qu'ils puissent à nouveau parler en toute tranquillité, loin des écoutes téléphoniques, et qu'elle ait appris pour son déménagement pour qu'ils puissent se réjouir ensemble. Il lui tardait qu'ils puissent à nouveau partager des bons moments comme ils le faisaient auparavant. Il irait peut-être chez elle pour l'occasion, histoire de l'aider à faire ses cartons.
Tout à ses pensées, son regard erra sur la pièce environnante pour finalement tomber sur le carton à souvenirs qu'il avait ressorti quelques jours plus tôt. Il se rappela qu'il s'était promis d'y jeter à nouveau un coup d'oeil. Il se leva et s'avança, se pencha pour ramasser une photo au hasard. Un regard profond et triste lui répondit.
Il se souvenaient tous deux de cette fameuse nuit. Charly avait passé sa journée à chercher Alex sans la trouver. Elle ne s'était pas rendu à son travail (elle avait alors un poste de surveillance maritime), son collègue : David Laisange, le lui avait confirmé. Il ne doutait pas qu'il ait été le premier à savoir qu'elle ne s'était pas présenté à son travail puisque Charly le savait constamment entrain de draguer Alex, qui se laissait d'ailleurs souvent faire avec plaisir.
Charly s'était aussi rendu chez elle, avait longé la côte en voiture, sans jamais la trouver. Il avait pour cela raté une journée d'étude, mais selon lui la recherche de son amie valait bien toute les journées du monde, études ou pas études. Finalement, il était rentré chez lui désespéré, après avoir laissé 57 messages sur son répondeur. Il s'était mis à pleuvoir.
Il avait eu le temps de patienter 1 heure et demie sans rien faire à part se rendre compte qu'on avait pénétré chez lui (ça ne pouvait être qu'Alex, avant qu'elle ne disparaisse mystérieusement), et se ronger les sangs avant qu'on ne sonne à la porte. Il avait accouru aussitôt. C'était Alex, les cheveux dégoulinant de pluie, en larmes, les habits trempés. Son maquillage avait coulé tout le long de son visage. Elle semblait se trouver dans une grande détresse.
Ni une ni deux, Charly l'avait faite rentrer et l'avait menée jusqu'à la salle de bain où il lui avait apporté des affaires sèches, trop grandes pour elle, et l'avait laissée se laver et se changer. Cela lui permettrait aussi de se remettre les idées en place et de se reposer avant qu'il ne la presse de questions.
Alex, à peine entrée dans la salle de bain, s'y était enfermée. Charly avait entendu le déclic de la serrure.
« Alex ?, avait-il appelé. Est-ce que tout va bien ?
Des pleurs puis :
-Laisses-moi. »
Il avait compris que quelque-chose n'allait pas, il lui avait demandé d'ouvrir. Elle n'avait pas répondu. Charly avait frappé, encore frappé. Il entendait toujours les pleurs à l'intérieur, ainsi que les bruits d'une agitation fébrile. Il avait alors couru jusqu'au garage où il s'était emparé d'un pied de biche, et était revenu tout aussi rapidement vers la salle de bain, dans l'intention de forcer la porte. Les bruits s'étaient intensifiés, des affaires devaient être répandues sur le sol. Charly avait senti son coeur s'emballer, il s'était mis à crier à Alex d'ouvrir cette porte, mais devant le manque évident de réponse, il avait dû employer les grands moyens. Les portes modernes et leurs attaches étaient bien plus résistantes. Néanmoins ce genre de portes n'étaient pas utilisées pour toutes les pièces, et heureusement pour Charly il n'avait pas trouvé bon de faire renforcer celle de la salle de bain. En y mettant toute sa force, il réussi à ouvrir la porte.
Alex était pétrifiée au sol et pleurait. La pièce était sans dessus dessous. Elle aait retourné tous les tiroirs. Au sol à ses côtés, une boîte de lames de rasoirs éventrée. Alex en tenait une à la main. Elle jeta un regard implorant à Charly qui laissa tomber le pied de biche sur le seuil. Il était sous le choc de la voir dans un état d'abattement si total. Néanmoins il ne se laissa dépasser par l'émotion et prit les choses en main. Il se pencha vers elle et jeta au loin la lame qu'elle avait à la main, puis la releva. Il l'assit sur le rebord de la baignoire et s'employa dans les cinq minutes qui suivirent à remettre de l'ordre pour que tous les objets soient inaccessibles depuis leur lieu de rangement. Enfin, il s'assit près d'Alex dont les yeux fixaient un vide perdu entre le carrelage en ardoise et son visage. Il passa un bras autour de ses épaules.
« Tu vas prendre une douche et te changer, ensuite nous parlerons.
Alex hocha la tête.
-Je reste dans la pièce. Je n'ai pas envie de te retrouver morte si je te laisse toute seule. »
Nouveau hochement de tête. Il alla se caler contre une commode, dos à elle. Alex se dévêtit et passa près d'une heure sous le jet avant de sortir de la douche et de prendre les affaires de Charly. Si elle flottait à l'intérieur elle aimait l'odeur rassurante qui s'en dégageait, l'odeur d'un parfum si souvent senti, l'odeur de Charly. Elle s'avança vers lui avec une nouvelle détermination dans le regard, même si elle ne valait toujours pas celle qui y brillait d'habitude.
Sur un mot de Charly ils gagnèrent le salon où ils s'assirent sur le canapé. La pluie frappait toujours fort contre les fenêtres et les volets claquaient sous un vent violent. Alex se serra contre son ami. Elle était toujours absorbée par le sol.
« Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ?, demanda Charly, de plus en plus inquiet.
Alex ne le regardait toujours pas. Il semblait que la voix vacillante s'adressait à un homme invisible allongé par terre.
-Je l'ai retrouvé Charly...
Il chercha à capter son regard, mais il restait toujours inaccessible.
-Tu l'as retrouvé ?
-Oui.
-Racontes-moi.
Elle ne marqua qu'un bref instant d'hésitation.
-Il m'a fait rentrer dans son bureau. Il m'a reçu comme si de rien n'était. Et puis nous avons parlé... Il... il a commencé à me dire... je ne sais plus trop quoi. Il... il disait qu'il savait. Qu'il savait quelque-chose que je ne savais pas. Je lui ai demandé quoi et il... il a avoué Charly... Il...
Elle se tourna vers lui. Ses iris étaient des puits de tristesse sans fond. Charly ferma les yeux, contenant tant bien que mal la colère qui menaçait d'exploser. Il serra les poings mais finit par prendre Alex dans ses bras. Elle avait recommencé à pleurer.
-Chuut... ça va aller. Tu as besoin de repos. Tu dors là ce soir, d'accord ? Ne pleures plus. Ça va aller. Je suis là ça va aller...
Elle se dégagea au bout de plusieurs secondes, le dévisagea. Elle partit dans un éclat de rire plus triste que joyeux.
-Quoi ?, s'enquit-il.
-Je suis si bête...
Il fronça les sourcils, se redressa.
-Pourquoi dis-tu ça ?
-Parce que je n'aurais jamais dû te mêler à ça.
Charly la saisit par les épaules.
-Alex, tu as des ennuis. Quoiqu'il t'arrive, quoiqu'il se passe, je serai toujours là pour toi. Tu entends ? Je m'en fous de ce qui peut bien me retomber dessus.
-Merci Charly.
Elle esquissa un faible sourire et essuya une larme.
-Mais tu sais ce qui est encore plus bête ?
-Non.
Elle se campa devant lui et saisit l'appareil photo dont la place habituelle était la table en verre devant le canapé. Elle prit Charly en photo avant d'annoncer :
-Aujourd'hui ça fait 10 ans qu'on se connaît. Et tout ce que je trouve à faire c'est ramener mes problèmes.
Le retour de cette déconcertante envie de vivre. Ce masque qui cachait à tous à sa nature fragile. Sauf pour Charly. Il lui prit l'appareil photo des mains et la prit en photo. Puis il le reposa.
-Ce sont les problèmes qui se ramènent. Et ce n'est pas grave. Ce soir on oublie tout et on fête les dix ans de notre rencontre. On remet tout le reste à demain. »
Ils se sourirent. Charly partit chercher deux verres et une bouteille de vin.
« Salut Alex, ça va ?
-J'ai eu pire et toi ?
-Quelques problèmes dans l'entreprise. Je crois que je vais être licencié.
-Toi licencié ? Arrêtes ! Tu as apporté plus à TTP que n'importe qui !
-Et bien ce n'est pas vraiment lié à cela mais... Keneth Dawson, le patron de TTP, est compromis par des affaires d'escroquerie.
-Ah... c'est vrai que j'en avais entendu parler.
-Je suis aussi tombé sur d'autres photos de nous d'ailleurs. Il faudra que tu les vois.
-Dans le carton dont tu m'avais parlé ?
-Oui.
-Et sinon à part ça tes journées se passent bien ?
-Oui oui. Rien à déplorer de mauvais. Je travaille, je me ballade, la routine en quelque sorte. Et pour toi ?
-Le travail est... éprouvant. Je me rends compte que je vais bientôt me séparer de mes élèves, et puis quelques-uns me posent des soucis aussi. Et il y a les souvenirs... ils ne cessent de me hanter depuis cet après-midi. Tu sais quand...
-Oui je sais, moi aussi j'y ai repensé toute la soirée.
-Tu me manques Charly.
C'était la première fois qu'elle le lui avouait. D'habitude elle préférait garder cela pour elle mais aujourd'hui elle n'en pouvait plus. Le dessin de John Cardo à ses côtés, elle ne pouvait empêcher les souvenirs de cette terrible journée d'affluer.
-À moi aussi tu me manques Alex. On se verra bientôt va. Ne déprimes pas trop.
Une pointe d'ironie revigorante. Pas assez néanmoins pour Alex qui esquissa à peine un sourire.
-Et pour mes recherches ?
-Pas vraiment eu le temps aujourd'hui. Je me suis chargé de modifier ton dossier à la GEA en revanche. Tu n'as plus à t'inquiéter. J'ai fait un peu le ménage dans tes connaissances.
-D'accord.
-Alex, est-ce que tu te sens bien ?
-Tu veux vraiment que je te dises ? Non. Ça ne va pas du tout. Enfin, je suppose que ça ira mieux quand on se verra.
-Bien sûr tiens ! Qu'est-ce que tu crois ? Je vais te remonter le moral moi !
Cette fois Alex rit de bon coeur. Elle résolut également de ne plus parler de ses ennuis pour l'instant pour aborder un autre sujet. Mais lequel ?
-Et ta vie amoureuse comment ça se passe ?
-On parle de ça maintenant ?
-Ben pourquoi pas ?
-Bien... Alors... Ma dernière copine remonte à un mois, elle aura tenu une semaine.
-Un véritable miracle.
-Comme tu dis oui.
-Et qu'est-ce qu'elle avait celle-là ?
-Elle m'appelait « poussin ».
-Oooooooh c'est grave ça, hein ! Tu aurais dû la dénoncer à la GEA tant qu'à y être.
-Non mais pour qui tu te prends ?, s'indigna-t-il entre deux éclats de rire. Et toi ? Tu collectionnes les succès peut-être ?
-À vrai dire j'essaie de ne pas trop m'intéresser. Je n'ai pas très envie qu'on se mêle de mes affaires... « poussin », ajouta-t-elle après réflexion.
-Très très amusant, répartit Charly. Très très très amusant. Et sinon, tu sais qu'il est possible de concilier amour et secrets ?
-Ça ne m'intéresse pas quand même. Si un jour je veux avoir une relation avec quelqu'un, j'aimerais qu'elle soit stable, tu comprends ? J'ai besoin de quelqu'un sur qui m'appuyer.
-Oui je comprends. Mais un jours peut-être tes problèmes se résoudront-ils, et tu pourras alors songer à autre chose. Et puis... En attendant tu m'as toujours moi.
-C'est vrai ça. Que ferais-je sans toi ?
-Aucune idée.
-Prétentieux !
-C'est toi qui as demandé !
Ils partirent dans un grand éclat de rire et échangèrent encore deux ou trois banalités avant que Charly n'intervienne.
-On se rappelle demain ?
-Oui.
-Je vais essayer de poursuivre tes recherches.
-Merci Charly.
-À demain.
-À demain... « poussin ». »
Alex rangea le dessin de John Cardo dans le tiroir de sa table de chevet, juste à côté de l'arme à feu confisquée quelques jours plus tôt. Ses affaires en ordre, elle fit quelques pas vers la cuisine.
Charly reposa la photo dans le carton après l'avoir fixée un cour instant. Alla cuisiner quelque-chose avant de prendre une douche.
Alex s'assit dans son lit en fixant le flacon. Quelques somnifères et les dernières gouttes de sa bouteille de whisky achevaient de l'envoyer dans les vapes.
Charly s'allongea, son ordinateur sur les genoux. Il se rendit sur internet et tapa les mots clés dans le moteur de recherche : « affaire ligne rouge ».