Sujet: Re: "Qui sera le maître de l'impro écrite ?" Saison 3 bis Dim 10 Juil - 23:05 .................................................................................................................................................................................................................................Il y a encore quelques jours, j’étais morte. Vide. Desséchée. Une morte solitaire qui errait sans but. Seul un rêve, une chimère, m’empêchait de sombre dans l’oublie en me forçant à la poursuivre. Un chimère miroitante. Inconsistante. Une simple illusion. Mais au fond, je me raccrochais encore un peu à elle. Le monde entier avait beau avoir cessé de tourner, quelque part quelqu’un avait refusé de s’arrêter en même tant que lui. Et il continuait à avancer sur son chemin. Tant qu’il s’opposerait, qu’il lutterait pour revendiquer au monde son droit de tourner, d’avancer, je ne pourrais pas reposer en paix. Jamais.
Mais ça, c’était il y a quelques jours. Aujourd’hui, je pouvais enfin admirer sur ma peau, et même la sentir au plus profond de moi, la libération tant attendu. Car enfin je l’avais trouvé….Dès que je l’ai vu, je me suis senti comme ressuscité. Toutes ces émotions que j’avais perdu, que je croyais avoir perdu son revenu. Avec la force d’un torrent furieux, elles se sont toutes bousculées en moi. A nouveau, j’étais en vie. Et comme n’importe quelle créature vivante, je pouvais enfin essayer de me réaliser. De donner un sens à cette nouvelle vie inattendu.
…
Alors … pourquoi ? Pourquoi suis-je maintenant si … si…
...
Vide ?
Quand je l’ai trouvé, mon cœur s’est remis à battre.
Doucement d’abord, encore engourdi qu’il était. Tant de temps avait passé depuis la dernière fois qu’il avait daigné m'offrir un petit soubresaut. Mais doucement, il s'était remis à battre, allant même jusqu'à retrouver un rythme normal. Dans mon corps froid et dure, j'ai sentie revenir la douce tiédeur de la vie.
Après tout ce temps, ce changement me fit peur, mais très vite alors que la chaleur me gagnait, je me suis sentie mieux. Bien même. Et mon cœur continuait à répandre cette douce chaleur. Bientôt, c’est à tout rompre qu’il se mit à battre. Et la douce chaleur devint feu. Un grand feu qui commença aussitôt à consumer l’ancien moi qui était mort il y a des années. Ce corps froid et douloureux fut instantanément vaporisé. Et comme un phénix, je me sentie renaître par le feu.
Usant d’une force jusque là insoupçonné, je le rejoignis alors qu’il ne m’avait pas encore reconnu. Rien sur terre n’aurait pu entraver mes retrouvailles avec cet homme que j’avais tant désiré.
Porter par mes émotions bouillonnantes, nous fumes réunit. Là, dans cette auberge semblable à des milliers d’autre, au milieu de parfait inconnus, nos deux destinés qui avait un temps divergé et pris des routes différentes allaient à nouveau s’unir pour n’en former plus qu’une.
J'avais imaginé que ce serait quelque chose qui prendrait du temps. Qui serait difficile à accomplir. Cela devait être grandiose. Cela ne pouvait être que grandiose. Un véritable apothéose. Un symbole fort qui montrerait à tous qu’une âme perdu avait retrouvé la voie. Qu’une morte pouvait vivre a nouveau.
La chose fut tout autre.
Ce fut rapide. Très rapide. Le temps d’un soupir. Et puis le temps sembla se figer. L’homme que je désirais tant se retourna doucement avec un air surpris sur le visage. Puis il me vit moi. Là, juste devant lui. Une succession d’émotion défilèrent alors très vite dans ses yeux. Et puis un voile commença à tomber sur son regard. Un petit sourire triste naquit timidement sur ses lèvres, il posa sa main sur mon épaule, presque avec tendresse. Et il s’effondra sans un bruit.
D’un geste sec, je retirais alors mon poignard de son cœur. Son sang m’éclaboussa aussitôt au visage. Ce sang chaud qui coulait dorénavant dans mes veines. Ce sang que je retrouvais enfin, après qu’il m’ait été volé. Volé en même temps que la vie de mon mari et celle de mes enfants. Volé par cet homme qui désormais gisait à mes pieds alors qu’une nappe écarlate s’étendait sous lui.
Je la voyais parfaitement s’agrandir cette nappe écarlate. Une belle couleur que cet écarlate. On aurait dit des rubis liquide. Regarder cette nappe s’agrandir doucement m’apaisait. Et petit à petit, je sortis de cette transe dans laquelle la vue de ce meurtrier m’avait mise.
Quelque part un cri fusa.
Un curieux sentiment m’habitait tout entièrement maintenant. Enfin libre, je le sentais plus clairement que jamais. J’étais … délivré... Mais de quoi au juste ? Du fardeau de mon passé ? Du fardeau de ma vengeance ? Du fardeau de la vie ? Je n’aurai su le dire.
Et puis, je compris. Un sourire triste naquit alors sur mes lèvres alors que je fermais doucement les yeux.
J’aurais du m’en douter. Dans un sens, c’était tellement évidement. J’aurais du le savoir.
Non.
Je le savais. Je l’avais même toujours su. Je savais.
Depuis ce jour maudit où en rentrant chez moi j’avais trouvé toutes mes vies noyés dans des flaques de rubis. Comment alors aurais-je pu l’ignorer alors qu’au loin je l’entendais s’enfuir ? Ce jour là, ce n’était pas trois personnes qui avaient vu leurs vies prendre fin. Non, ce jour là, c’était quatre vies qui avaient pris fin au même moment.
Quelle folie avait bien pu me faire penser que je pourrais échanger ma vie contre la sienne ? Maintenant, je comprends. Mes yeux étaient fermés, et pourtant, je voyais clair pour la première fois depuis une éternité.
Comme un enfant, je venais de découvrir la chimère que j’avais tant cherchée. Mais comme un enfant, j’avais volontairement ignorée une vérité élémentaire. Les êtres fantastiques, comme les miracles, n’existe que dans les rêves. Alors que la vérité commençait à tailler en pièce l’illusion qui m’avait maintenu en vie si longtemps, je sentais mon esprit, mon âme et tout mon être se faire lacérer sans pitié par cette vérité qui me privait de mes dernières illusions.
Pourtant, je ne sentais aucune douleur. Rien qu’un immense vide. Ce n’était pas un abyme qui s’offrait à moi -voilà longtemps que j’étais tombé en son seins et que nous ne formions plus qu'un- mais bien une certaine forme de rédemption.
Alors que je sentais mon être s’étioler de plus en plus, en commençant par l’endroit où le sang du péché transmis m’avait éclaboussé, j’acceptais enfin mon sort. Un peu à regret, je dois bien l'admettre. Il y a tellement longtemps que j'aurais du trouver la force de faire ce qui aujourd'hui s'imposait à moi. Mais cela n'avait plus la moindre d'importance. Le monde s'était finalement arrêter pour de bon. Et je dois bien reconnaître qu'il était temps. Je suis si lasse...
Quelques fois, il y a des murs qui ne sauraient être franchis. Des choses qu'on ne peut défier. La mort est absolue. Et la vie éternelle n'est rien de plus que le songe d'une nuit. Mais quelques fois, il arrive qu'une personne s'égare. Un mort peut-il feindre la vie ? Ou bien est-ce la vie qui refuse la mort ?
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